Conception graphique et montage : Jean-Marie Jolly

 

Industrie ardennaise et française d’hier et d’aujourd’hui

    Si la notoriété internationale de Rimbaud – sujet de notre jeu cette fois-ci ! –, gentiment moquée avec talent par Bruno Pia, ne se dément pas, celle de l’industrie ardennaise a perdu de sa superbe après la Première Guerre mondiale…

    Trop souvent, depuis cinquante ans, la main-d’œuvre ouvrière de notre département comme celle de la France a déchanté et pourrait, paradoxalement et amèrement, entonner Les mains d’or, écrite par Bernard Lavilliers, interprétée avec conviction par Joël Bougeard.

    On peut légitiment craindre que les mois à venir seront bien difficiles sur ce que les “experts” appellent “le front de l’emploi”. Cette rhétorique guerrière n’est pas – contrairement à celle employée à l’encontre du coronavirus – totalement inappropriée, tant il faut parfois se battre pour avoir un travail.

    Nous racontons le temps où, à Mohon, Vrigne-aux-Bois, Vivier-au Court, l’industrie ardennaise tournait à plein régime et où de petites lignes départementales s’ouvraient pour transporter les produits des usines. D’une certaine façon et sans dévoiler où elles ont été prises, les deux photos mystères témoignent également de ce temps faste pour l’emploi, même si la condition ouvrière n’était pas des meilleures…

    Ne manquez pas, non plus, de lire les mésaventures advenues à des maires ardennais pendant l’exode. Là, il n’est pas sûr que cela ait changé : “l’affaire” des masques qui ne seraient pas remboursés à la municipalité de Charleville-Mézières au prétexte qu’elle les aurait commandés trop tôt en est la preuve…

Jacques Lambert

 

Mardi 26 mai 2020

Après 55 jours confinés, le 16e jour de déconfinement

     La pensée du jour 

 

« Seuls les hommes libres peuvent négocier »

 

 avait répondu Nelson Mandela, en 1984,  à Botha qui lui avait proposé la “liberté” en échange de son silence.

 

   Commençons en chansons...     

 

 Au pays du grand mort - Bruno Pia

_________________________________

LE BAL À JOJO

Les mains d'or - Bernard Lavilliers

 

 

Énormément de bonnes choses à regarder sur ce blog, en période de confinement ou non !

Neuneu (El' marou...)

   Se promener avec Terres Ardennaises
 

      Nous étions… à Saint-Aignan

   

    Mais, selon Marylène Thillens1, les « ingénieurs qui se sont succédé dans l’étude du projet de canal des Ardennes » l’appelaient « la tranchée de Cheveuges ». Elle fut longuement discutée cependant le fait que le « contour de la montagne de Cheveuges » entraînait un allongement de 7 km, source de dépenses supplémentaires. Le « souterrain de Cheveuges » dont « la longueur totale (…) tant en souterrain qu’en tranchée avoisine 600 mètres » fut avalisé par l’ingénieur De Noël, qui avec son collègue Du Peirat n’était pas au début favorable à ce choix, en 1822.

    Cette partie du canal deviendra ensuite « le souterrain - dit de Saint-Aignan - ». Des travaux d’agrandissement y seront entrepris en 1889.

    La photo de Jean-Michel Benoît représente l’entrée du canal en venant de Pont-à-Bar, celle de Pascal Chagot l’entrée venant du Chesne.

Photo Françoise Parizel

    La photo de Françoise Parizel est prise dans le souterrain, sens Pont-à-Bar-Le Chesne. Elle a publié une photo similaire dans Les Ardennes à fleur d’eau2 avec cette légende : « Entrée du tunnel de Saint-Aignan. Le souterrain est creusé dans “une montagne”, constituée de bancs de calcaire coquillier rougeâtre alternant avec des couches de terre sableuse. Au pied, se trouvent des roches de pierre tendre (calcaire oolithique). Le halage se faisait au moyen d’une main courante en fer fixée à 1,30 m au-dessus du niveau de l’eau, et les chevaux passaient d’un côté à l’autre par un chemin granitique au-dessus de la colline. »


1 Marylène Thillens, « Les grandes étapes de la construction du Canal des ardennes », in Le Canal des Ardennes, Société d’Études Ardennaises, 1987, 108 pages.

2 Marie-France Barbe, « Un trait d’union entre Meuse et Aisne », in Les Ardennes à fleur d’eau, Éditions Terres Ardennaises, 2010, 348 pages.

 

 

En vente auprès de la SHA

 

 

Où sommes-nous ?

 

    Michel Piccoli et les Ardennes

  

    Jacques Morice de Télérama a titré son papier d’hommage à Michel Piccoli : « Mort de Michel Piccoli, un des derniers géants du cinéma français ».

    Ce “géant” – le mot est juste ! – est venu tourner dans le film de René Clément : Le jour et l’heure1, à Wasigny. Vous pouvez lire l’histoire de ce tournage publiée dans Mémoire du Cinéma dans les Ardennes. Je me permets simplement d’en tirer cette anecdote rapportée par Jean Lefèvre, propriétaire de l’Auberge de l’Abbaye, où étaient logés le réalisateur et l’acteur américain Stuart Withman : « Michel Piccoli a donné une grande réception et tous mes stocks de whisky ont été épuisés… »

Collection Dominique Mézières.

Claude Pinoteau2, alors assistant réalisateur, était venu en repérage et avait trouvé que Wasigny serait un bon décor.

 

Tournage à Wasigny. Document Internet.

Les deux « stars » du film étaient Simone Signoret et Stuart Withman, comme le montrent ces affiches. Il faut souligner que la cinquième est tout bonnement une “arnaque” par rapport au sujet du film : l’aide apportée, pendant la Seconde Guerre mondiale, par une bourgeoise parisienne à un aviateur américain qu’elle aide à tenter de gagner l’Espagne !

               

     

    N’ayant pas vu le film depuis des décennies ( !), je ne me souviens pas exactement du rôle joué par Michel Piccoli mais qui n’était pas principal. Comme Simone Signoret, il avait déjà tourné dans plus de 30 films mais il n’avait pas, à l’époque, la même notoriété qu’elle, les choses évoluant à partir des années soixante-dix.

Ce qui explique cette jaquette de DVD, sorti beaucoup plus tard,  qui est, elle aussi, une “tromperie”.

    Lors du centenaire de la naissance du cinéma en France en 1995, Michel Piccoli occupa le poste de président de l’association « Premier siècle du cinéma ». Nous n’avions pu terminer « Mémoire du Cinéma dans les Ardennes » pour ce centenaire mais seulement l’année suivante. Ayant obtenu son adresse parisienne par Jérôme Thirriot, je lui envoyai un petit mot, accompagné des photos du tournage que j’avais retrouvées du Jour et l’heure, lui demandant s’il acceptait de préfacer cet ouvrage.

  Format 21 x 30, couverture en couleur, pelliculée, 232 p. dont un cahier en quadrichromie.

29,73 € + frais de port Tarif 4 (clic ici).

    La réponse ne tarda pas, courte mais courtoise et malheureusement négative : Michel Piccoli expliquait que l’année du centenaire du cinéma était finie. En quelque sorte, j’avais raté l’année !

    Ce fut un grand regret, d’autant plus que j’ai égaré par la suite la lettre… Certes, je ne suis pas collectionneur d’autographes, cependant ! Mais l’immense plaisir de voir jouer Michel Piccoli3 n’en a jamais été gâché. Car, comme l’écrit en conclusion Sandrine Marques4, en plus d’avoir joué avec les plus grands, « son engagement politique et citoyen n’a jamais fléchi. Pour lui, le cinéma servait à rendre compte des désordres et des délires de notre société. Sinon, il n’avait guère d’intérêt. Michel Piccoli en a été son intranquille témoin, tout au long d’une carrière exceptionnelle ».

    

Jacques Lambert


2 Les deux plus grands succès de Claude Pinoteau, devenu réalisateur, sont La Gifle et La Boum.

4 Sandrine Marques, « Michel Piccoli, Comédien », Le Monde du mercredi 20 mai 2020.

Pour rester dans le sujet principal de ce journal, Jean Gabin et Michel Piccoli, ouvriers au cinéma

    En écrivant sur la présence de Michel Piccoli pour le tournage du Jour et l’heure à Wasigny, j’ai pensé à l’idole cinématographique de mon père : Jean Gabin, mais, précisait-il, celui d’avant-guerre. Une période au cours de laquelle il a interprété plusieurs rôles d’ouvriers : Le jour se lève, La Belle Équipe, La Bête humaine, pour ne citer que quelques-uns des plus connus, inventés souvent par Jacques Prévert. La Belle Équipe1 est, en particulier, un film « typiquement » Front populaire, dans lequel Jean Gabin interprète la célèbre chanson : « Quand on se promène au bord de l’eau2 ». Le destin de ce film, pour lequel deux fins ont été tournées (!), et de plusieurs de ses acteurs masculins est absolument à découvrir sur https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Belle_Équipe

    À ma connaissance, Michel Piccoli, dont la disparition a attristé beaucoup de spectateurs de notre génération, n’a joué qu’un rôle d’ouvrier extravagant dans Themroc3, film de Claude Faraldo, sorti en mars 1973. Jacques Mandelbaum du Monde4 écrit que c’est, « de fait, l’un des derniers feux cinématographiques de l’utopie sociale en France, pour ne pas dire son chant du cygne ». Comme Jean Gabin, Michel Piccoli se révoltait lui aussi contre la société, mais cette dernière ayant bien changé, la manière de se révolter aussi.

    Ces deux acteurs parmi les plus grands du cinéma français ont eu une carrière bien différente. Après la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle il combattit valeureusement, Jean Gabin eut beaucoup de mal à retrouver du travail et son statut de vedette… Il se tourna alors vers une carrière plus sage et joua souvent, dans des films très calibrés, des rôles – même lorsqu’il s’agissait de truands – embourgeoisés. À la fin de sa carrière, de nombreux critiques écrivent qu’il cabotine, voire qu’il se caricature. On rapporte qu’il refusa toujours de jouer un rôle d’ecclésiastique pour ne pas dérouter “son” public.

    En revanche, la carrière immense de Michel Piccoli est pleine de chemins de traverse, de rôles improbables, de films de débutants. Il joua d’ailleurs magnifiquement, lui, un pape qui ne voulait pas l’être dans Habemus Papam de Nino Moretti, en 2011.

    Mais, en 1970, dans Le Chat de Pierre Granier-Deferre, Jean Gabin interprète sobrement et magistralement un ancien ouvrier typographe marié à une trapéziste jadis victime d’un accident, que transcende l’immense Simone Signoret. Jean Gabin, avant le démarrage du Chat, avait précisé : « Donnez à Madame Signoret ce qu'elle veut. Si elle ne fait pas le film, je ne le fais pas non plus5. »

    Voilà au moins un point commun à ces deux “géants” du cinéma français, ils ont tourné l’un au début de sa carrière et l’autre à la fin avec Simone Signoret. Olivier Rajchman6 de L’Express a décrit Simone Signoret : « Elle avait une telle présence, une telle justesse dans le jeu qu'on ne pouvait la comparer qu'à Gabin, observera Philippe Noiret, précisant : les acteurs comme Simone ne cherchent pas à vous bouffer, ils sont au-dessus de cela. »

    C’est là une parole de connaisseur, vivant le cinéma de l’intérieur et pouvant donner son avis sur le travail de ses partenaires – “ouvriers du cinéma” –, mais pour nous, simples spectateurs, avouons-le, Jean Gabin, Michel Piccoli, Simone Signoret et Philippe Noiret sont tous de remarquables comédiens qui nous  manquent.

    L’atelier de paquetage à l’usine Lefort de Mohon, une carte postale pour raconter une histoire industrielle

 

 Collection Dominique Mézières.

    Cette carte postale date de la Belle Époque, âge d’or de ce nouveau support de communication. Parmi les innombrables photos reproduites, il y a une part appréciable qui représente des paysages industriels avec des composantes symboliques fortes comme les hautes cheminées, les hauts fourneaux, d’impressionnantes machines, mais aussi des usines et des ateliers en activité, des groupes de travailleurs. Sont montrés aussi des ouvriers et des ouvrières dans leur environnement, prenant la pose ou en train d’accomplir une tâche. La dimension sociale n’est pas ignorée avec des photos de cités ouvrières et de châteaux patronaux, voire de manifestations et de grèves. C’est une façon d’exalter l’industrialisation triomphante et d’exprimer une foi solide dans la technique comme une des sources du progrès avec la science.

    Cette carte postale montre un atelier de paquetage faisant partie de la plus importante usine de la société Lefort et Cie, celle de Mohon 1. Installée au lieu-dit la Forge, sur la Vence, en aval du Moulin Leblanc, c’est un ancien site de la Manufacture d’armes de Charleville qui a été acheté en 1838 par un marchand-fabricant de clous carolopolitain, Jean-Baptiste Regnault (1788-1858). À partir du milieu des années 1880, Mohon 1 a été spécialisée dans la production de fils de fer destinés à la fabrication mécanique des clous, des pointes, mais aussi de la ronce artificielle. Sous la houlette de Jean-Baptiste Lefort (1852-1910), cette tréfilerie connaît un essor remarquable dans le contexte difficile de la Grande Dépression. En 1887, elle dépasse définitivement l’usine de Saint-Marceau, qu’a créée Antoine Gaspard Regnault (1810-1874) à la fin des années 1850, par son volume d’activité et son nombre de salariés. À la fin du Second Empire, cette clouterie était très réputée pour sa spécialisation dans « la clouterie à chaud d’origine américaine » et sa fabrication de grands clous à biseau destinés à la construction et à la construction navale.

    Depuis son entrée aux Clouteries de Mohon et Saint-Marceau en 1865, Jean-Baptiste Lefort, fils d’un manouvrier de Vendresse, a accompli un très beau parcours professionnel. Sa fidélité aux héritiers de la troisième génération, Paul Regnault (1840-1914) et Léon Regnault (1843-1908), et ses compétences remarquables sont récompensées par sa nomination en qualité de directeur des clouteries de Mohon (Mohon 1) en juin 1892. Par ailleurs, il a joué un rôle efficace de conciliateur dans la lutte de pouvoir qui a opposé les frères Regnault depuis 1884, chacun à la tête d’un clan d’actionnaires intransigeants. En septembre 1891, cette hostilité virulente aboutit à la dissolution de la Société des Forges et Clouteries réunies de Mohon et Laval-Dieu qui existait depuis 1879, au capital social de 7 millions de francs. C’est l’échec d’une intégration verticale vers l’amont, un mariage raté entre les clouteries de Mohon et Saint-Marceau et les Forges de Laval-Dieu qui devaient fournir des fers et des tôles. Celles-ci passent dans le giron de la S.A. des Mines de Meurthe-et-Moselle et des Usines de Villerupt. Puis en 1913, elles seront absorbées par Senelle-Maubeuge.

     Fin janvier 1893, Jean-Baptiste Lefort est porté à la tête de la nouvelle société Lefort et Cie, dotée d’un capital social de 3 millions de francs. Les frères Regnault, qui détiennent prés de la moitié des actions, lui confient la gestion des usines de Mohon 1 et Saint-Marceau. Et, en 1905, les frères Regnault adouberont la nomination de Léon Lefort (1878-1939), le fils de leur fidèle collaborateur, au poste de secrétaire général. Ingénieur, ce dernier prendra la succession de son père en 1910. Le dessein des frères de Regnault, ébranlés par leur opposition acharnée entre 1884 et 1892, était d’assurer la pérennité de leurs usines en choisissant un successeur de valeur. Ils refusaient « l’introduction dans la société d’une personne par droit de naissance » et d’entretenir « des bouches inutiles ». L’abondante correspondance que les trois hommes entretiennent révèle une forte proximité qui va au-delà des échanges professionnels. Ils parlent d’eux-mêmes, de leurs vies quotidiennes, et ne sont pas avares de confidences, voire de quelques ragots. Dès 1903, ils craignent le décès de leur homme idoine, s’inquiètent aux « moindres racontars » sur sa santé qu’on leur rapporte. Ils lui conseillent de jouer « le rôle d’un inspecteur général qui se décharge de la besogne la plus assujettissante sur un personnel bien stylé » (janvier 1906). La troisième génération des Lefort, André (1904-1952) et Robert (1909-1963), verra passer progressivement la société sous la coupe des Hauts Fourneaux de la Chiers jusqu’à l’absorption en 1969. Une illustration de la loi des trois générations découlant du roman de Thomas Mann, les Buddenbrock.   

    Depuis sa nomination comme gérant jusqu’à son décès en 1910, Jean-Baptiste Lefort mène une politique d’expansion. Il fait l’acquisition de tréfileries à Marchiennes dans le Nord (1898), de petites usines (Nouzon, Villers-Cotterêts, Charleville, Marchiennes, Stenay), de moulins (Saint-Marcel et Warnécourt), de la clouterie (Mohon 2) appartenant à son cousin germain Henri Regnault (1904), en aval de Mohon 1, et de la poudrerie de Saint-Ponce (1907) Le but de cette stratégie étant d’éliminer toute concurrence. Dans le même temps, il investit dans l’appareil de production en construisant une nouvelle tréfilerie à Mohon 1 (1896), en faisant des agrandissements et en achetant des machines, des presses, des bobines de tréfilerie, et en faisant installer un appareil à galvaniser. Il s’agit d’élargir la production au-delà des clous : pointes, crampons, grillages, ronces artificielles, fils de quincaillerie, articles de bâtiment, et deux machine à vapeur (1895 et 1908). Afin de gagner son indépendance envers les sidérurgistes lorrains, Jean-Baptiste Lefort fait construire un premier four Martin qui entre en marche à la fin du mois de novembre 1899, puis fait installer peu après un blooming pour « laminer les gros lingots d’acier en blocs ». En 1902, un deuxième four Martin est édifié. Et un troisième en 1910/11. Mohon 1 est ainsi devenue une usine intégrée dont une grande partie de la production d’acier est dénaturée sur place en fil machine pour la tréfilerie et en tôles pour la clouterie. Le surplus de fils d’acier bruts est vendu.

Collection René Colinet.

    Grâce aux beaux bénéfices mis dans les fonds de réserves et de prévoyance, les investissements ont été totalement autofinancés. De 1893 à l’année 1912/13, 63 % des bénéfices totaux n’ont pas été distribués, soit près de 14 millions de francs. À Saint-Marceau spécialisée dans la fabrication des clous, fers à bœuf, et pattes forgées, deux turbines ont été installées pour produire de l’électricité (1894 et 1895), et la machine-vapeur remplacée (1897) ; à Marchiennes, une nouvelle tréfilerie est construite (1909/1910) pour développer la production de grillages et de pointes. Paul Regnault n’hésite pas à comparer la réussite de Jean-Baptiste Lefort à celle de Napoléon à Austerlitz (lettre de 1903). Sous sa houlette, le chiffre d’affaires de la société est passé de 5 130 000 francs (1898) à plus de 9 millions de francs (1910). Et les bénéfices bruts de 581 911 francs à 1 303 603 francs. Au moment du décès de Jean-Baptiste Lefort, la société Lefort et Cie compte 1 641 salariés dont le salaire moyen annuel s’élève à 1 552 francs (1 339 francs pour les ouvriers). En 1897, on ne dénombrait que 919 salariés dont 812 ouvriers, 40 employés, 67 contremaîtres et voyageurs de commerce. Il a fait construire des cités ouvrières (1905 et 1909) pour retenir  « une main-d’œuvre rare, chère, et difficile ».

Collection René Colinet.

    De 1910 à l’été 1914, Léon Lefort poursuit la politique de son père. À Mohon 1, la Vence est détournée et de nouvelles voies de chemin de fer sont installées dans l’usine. La vieille tréfilerie en bois de Monthermé est remplacée, l’usine textile Harmel à Boulzicourt est achetée juste avant la guerre. C’est lors de l’année comptable 1912/13 que le chiffre d’affaires atteint un niveau jamais connu auparavant, soit 10 995 369 francs pour un bénéfice de 1 474 430 francs, et une masse salariale de 2 867 958 francs pour 1 480 salariés. Par ailleurs, les capitaux propres couvrent largement les immobilisations. Autrement dit, la valeur des bâtiments, des machines, et de tout l’appareil de production. Une situation très saine qui correspond à la volonté de Paul Regnault de ne pas recourir à l’endettement (garder le contrôle des actionnaires, donc de la gouvernance) et « d’amortir (autofinancer) les immobilisations (investissements) faites ou à faire ».   

    Le photographe chargé de faire la photo saisit une scène de travail avec des femmes et des hommes absorbés par l’objectif. Il faut préciser qu’avant 1914, le temps de pose se compte en minutes. À hauteur d’œil, on découvre un atelier ordinaire couvert d’un toit à deux pans et éclairé par la lumière naturelle (vitres du toit) et électrique (ampoules à incandescence). Au premier coup d’œil, l’intérieur de cet atelier surprend par sa propreté et l’absence de désordre. Chaque individu et chaque objet sont à la bonne place, dans un espace de travail bien circonscrit et bien agencé de part et d’autre d’une allée qui permet des déplacements aisés. On peut se demander s’il ne s’agit pas d’une mise en scène trop parfaite pour donner une bonne image de la société Lefort et Cie, reflet de la bonne gestion de son dirigeant, Jean-Baptiste Lefort. Quoi qu’il en soit, cette carte postale est identique à deux autres datant de la même époque. L’une représentant un atelier de mise en rouleaux du fil d’acier, produit sur place, par une main-d’œuvre féminine, et l’autre un atelier de fabrication mécanique des pointes par des adolescents. De fait, ces trois cartes postales constituent une présentation du processus de fabrication à la tréfilerie, de l’amont vers l’aval. Autrement dit, de la matière première dénaturée à l’expédition du produit fini.

Collection René Colinet.

 

    Revenons à la photo à l'origine de cet article qui donne une image apaisée du monde du travail, voire aseptisée. Cela ne pouvait que plaire aux frères Regnault, très conservateurs. Dans leurs échanges épistolaires (1898-1910), ils dénoncent avec véhémence « les élus (socialistes, républicains avancés) de la canaille (ouvriers révolutionnaires, syndicalistes) », « le combisme (anticléricalisme) », la « bien mauvaise maçonnerie (francs-maçons qui ont soutenu Dreyfus au détriment de l’honneur de l’Armée) », et les « anarchistes révolutionnaires ». En 1904, ils sont dépités de l’échec aux élections municipales, à Monthermé, de « la liste des ouvriers honnêtes » comprenant un de leurs anciens employés, Jacquemin, qu’ils soutenaient face aux socialistes et à leur tête de liste Bancquart. Ils réprouvent « les lois ouvrières » qui ne « produiront que des résultats contraires à ceux promis » (janvier 1906), et ils s’insurgent contre l’idée d’ « un impôt progressif ou la confiscation » (mars 1905). Lors de la « grève intempestive » à Saint-Marceau en 1910, ils soutiennent Léon Lefort dans ses « idées de résistance et de fermeté ».

    On voit sur cette photo une majorité de femmes occupées à leurs tâches de paquetage des produits finis. Parmi les trois hommes nettement visibles, le plus ancien pourrait être le contremaître. Chez Lefort et Cie, la main-d’œuvre féminine est très minoritaire, comme dans la métallurgie en général, sauf la boulonnerie où il y a davantage de femmes qui filètent les boulons et taraudent les écrous. En 1911, les quatre usines de Lefort et Cie emploient une main-d’œuvre de 1 654 personnes dont 1 474 ouvriers, 64 employés, 49 contremaîtres et chefs d’équipe, et 67 voyageurs de commerce. La répartition de la main-d’œuvre ouvrière se fait ainsi : 664 à Mohon 1, 313 à Marchiennes, 242 à Saint-Marceau, 219 à Mohon 2. Parmi cette main-d’œuvre, on compte 1 086 hommes (dont 509 à Mohon 1), 98 femmes (35 à Mohon 1), et 254 enfants âgés de 12 à 18 ans (120 à Mohon 1). Depuis la fin du XIXe siècle, le salaire ouvrier par an a connu une augmentation appréciable en valeur nominale : 1897 : 987 francs. 1913 : 1534 francs. Soit un gain de 55 % mais dans une période marquée par une accélération durable de l’inflation et la question de la « vie chère » à partir de 1910 qui provoque des manifestations populaires et des grèves (voir Journal de confinement n° 7, 2 mai 2020).

    Cet atelier de paquetage est aussi un magasin de stockage avec des casiers ordonnés au-dessus desquels s’élèvent des tas de paquets en attente d’être expédiés. On les retrouve aussi sur le côté droit. La vente des produits finis obéit en effet à un rythme saisonnier qui oblige à avoir d’importants stocks. On remarque une balance, au premier plan à droite, divers outils, et l’utilisation d’échelles et d’une brouette pour la manutention. De nombreux bacs métalliques rectangulaires, avec des indications numérotées sur leurs faces, s’entassent à gauche de l’allée centrale. En l’absence d’une documentation écrite complémentaire, il est difficile d’en définir l’usage. Au premier plan, on voit un bac rempli de sable duquel émerge la partie supérieure d’un objet (?). C’est bien là une limite à laquelle on se heurte dans le décryptage d’un tel document iconographique, plus d’un siècle après. Parmi les lecteurs du Journal de confinement de Terres Ardennaises, y aura-t-il des personnes capables de nous éclairer ?     

René Colinet

Pour aller plus loin…

René Colinet, Métallurgie Ardennaise. Un territoire, des usines et des hommes. ORCCA/Castor § Pollux, 2001, 156 pages.

René Colinet, « Clouteries, tréfilerie, familles patronales des années 1830 à 1914. Des Regnault aux Lefort », in Revue Historique Ardennaise, Tome XXXII, 1997, p.149-263.

René Colinet, « La boutique du cloutier, ultime vestige d’une proto-industrie disparue », in Les Mémoires de l’Industrie en Champagne-Ardenne, dir. Gracia Dorel-Ferré, Éd Lieux Dits, 2016, p.146-161.

René Colinet, « Le four à puddler et la machine à faire les clous, les cheminements de deux innovations dans les Ardennes, au XIXe siècle » in Le Patrimoine industriel dans tous ses états, dir. Gracia Dorel-Ferré, Éd. APIC, Université de Savoie Mont Blanc, Terres Ardennaises, Grand Est, 2019, p.188-194.

Jacqueline Lalouette, La France de la Belle Époque, Taillandier, 2013, 285 p.

Marie-Claude Scherrer, Gérard Vindt, « La carte postale de 1869 à nos jours », in Alternatives Économiques, n° 260, juillet-août 2007, p.49-70.

 Denis Woronoff, La France industrielle. Gens des ateliers et des usines 1890-1950. Édition du Chêne. 2003, 294 pages.

Articles de René Colinet sur le thème de l'industrie parus dans la revue Terres Ardennaises : 

  • « Un fleuron du patrimoine industriel, le “château” Marcadet et ses vitraux peints à Levrézy 1 », n° 49, décembre 1994, p. 38-40.
  • « Un fleuron du patrimoine industriel, le “château” Marcadet et ses vitraux peints à Levrézy. 2 », n° 51, juin 1995, p. 19-24.
  • « L’usine Bernard Huet à Vivier-au-Court, cinq générations d’industriels 1852-1980, 1re partie », n° 98, mars 2007, p. 1-8. La seconde partie, écrite par Robert Jonet, est parue dans le n° 99 de juin 2007, p. 1-15.

Découvrez le musée en cliquant sur l'image ci-dessus.

 

Une vidéo de présentation

    Vrigne-aux-Bois et Vivier-au-Court, les capitales de la quincaillerie au XIXe siècle

    En 2019, nous avons participé à l’ouvrage : « Le Patrimoine industriel dans tous ses états. Un hommage à Louis Bergeron » que nous diffusons.

    Il comporte des sujets sur les Ardennes, l’ex-Champagne-Ardenne, la région Grand Est, la France, l’Afrique du Sud, l’Allemagne, la Belgique, le Chili, l’Espagne, le Mexique, la Russie.

    Dans la perspective d’un tourisme estival « de proximité », il offre des perspectives de promenades sur les traces de l’industrie, dans les Ardennes et dans les régions proches. Et il permet de voyager à travers le monde, tranquillement assis chez soi.

Pour les découvrir : clic sur l'image

Format 29,5 x 24,5 cm

  464 pages en quadrichromie,

environ 300 photos et 100 documents

(aquarelles, cartes, cartes postales, plans, tableaux…)

   couverture cartonnée ; dos carré cousu collé.

--------------------------

   38 €  + frais port Tarif 3 (clic ici)

 

 

    Et, à l’automne, nous avons sorti un livre aussi étonnant qu’agréable à lire sur ce qui fit la richesse de Vrigne-aux-Bois et Vivier-au-Court, deux petites villes ardennaises. Nous reprenons le début de la présentation que nous en avons fait dans la lettre de Terres Ardennaises n° 74.

Format 22 x 28

   268 pages à la française

   Quadrichromie

   couverture cartonnée ; dos carré cousu collé.

----------------------

28 €  + frais port Tarif 3 (clic ici)

   Ce livre « nous incite à « balayer devant notre porte », plus précisément d’ailleurs « devant nos fenêtres » ! En effet, il s’intéresse, non pas à un patrimoine glorieux, mais, comme le signale son auteur « au petit patrimoine, à l’art populaire ». Il s’agit des arrêts – dits « primitifs », à broche et chaînette, tourniquets, loquets, verrous, en forme de crochet, à ressort, à contrepoids, à capucine… – qui ont bloqué ou bloquent encore volets, contrevents et persiennes sur les vieilles maisons ».

    Voici trois cartes postales, choisies et légendées par l’auteur, qui ne peuvent que vous inciter à lire les quelques pages que nous avons retenues.

 

Vrigne-aux-Bois, la forge Gendarme                                       Collection Marc Stampfler

Cet ensemble de quatre halles construit en 1824 par Jean-Nicolas Gendarme (voir Journal de confinement n° 12 du 19 mai 2020) sera exploité par les Gendarme jusque dans les années 1876. Des tonnes de fontes moulées y ont été coulées destinées, entre autres à la fabrication des fers à repasser.

Il est ensuite loué à la famille Dardenne qui y produira des articles de quincaillerie pour le bâtiment jusqu’au milieu des années 1930  et à la Maison Creton qui y restera jusque 1969.

Aujourd’hui encore, symbole du passé industriel de Vrigne-aux-Bois, elle marque le paysage de la commune.

Vivier-au-Court, rue Moraimont                                             Collection Marc Stampfler

La vie ouvrière concentrée en un cliché : les mères de famille et les enfants à la porte de leur logement, le lavoir et, à proximité, la « Grande Boutique » et son extension, bâtiments imposants des Établissement Camion-Frères où les maris et fils travaillaient.

Vivier-au-Court, Camion-Frères : atelier des meules à eau - Collection Marc Stampfler

    Ces meules servaient à polir les lames de fer à repasser. Chacune d’elle pesait plus de 4,5 tonnes. Le travail des ouvriers y était difficile. L’ouvrier (au premier plan à droite), le dos appuyé sur une planche, pressait la semelle du fer sur la meule. On peut imaginer la poussière de fer qu’il devait respirer à longueur de journée. En 1912, la Maison Camion-Frères sortaient des ateliers des milliers de fer à repasser déclinés en 75 modèles.  

Extrait du livre

Clic sur l'image >>>>>    

 

    Du Tremblois à la frontière belge : le tortillard de Rocroi

    Actuellement, la frontière avec la Belgique est fermée. C’est donc le bon moment pour évoquer la ligne qui, de 1895 à 1952, relia Tremblois-lès-Rocroi à Petite-Chapelle !

 

 Collection Dominique Mézières.

     Cette carte étonnante immortalise l’arrêt du petit train en plein centre ville, au début du XXe siècle. Dans l’Hôtel du Commerce, les voyageurs prenaient leurs tickets. Mais cette dérivation ne dura que jusqu’en 1905.

 

L’Hôtel du Commerce actuellement.

 *********************************************************** 

Pour en connaître l’histoire de cette ligne :

Catherine Poncelet,

« Du Tremblois à la frontière belge : Le tortillard », in Terres Ardennaises n° 14, mars 1986, pages 5-7.

clic sur l'image    >>>>    

Prenons le petit train avec les cartes postales de Dominique Mézières :

Clic sur l'image >>>>>    

(5 Mo)     

 

    De quelques aspects de la situation de maires ardennais et du préfet des Ardennes pendant l’exode

 

     Avant l’exode, à Thin-le-Moutier

    Le maire de Thin-le-Moutier a adressé au préfet des Ardennes, le 7 septembre 1939, une question relative « aux moyens de transport qui seront mis à sa disposition pour répartition des voitures ».

    Il dresse la liste des 315 personnes qui ne pourront marcher : 68 vieillards de plus de 70 ans qui devront être accompagnés, 22 vieillards valides ne nécessitant pas d’accompagnement, 2 malades couchés, 68 enfants de 0 à 8 ans, 62 enfants de 8 à 12 ans et 93 personnes accompagnant les infirmes, les vieillards et les enfants.

    Sur les 207 personnes en état de marcher, il faut retirer 80 à 90 hommes et enfants de plus de 12 ans qui devront conduire 202 chevaux et accompagner 1 464 bovins : 517 vaches laitières, 350 bœufs et génisses de plus de 2 ans, 353 veaux de 1 à 2 ans, 244 veaux de moins d’un an, et 61 porcs dont 17 petits ainsi que 53 moutons et agneaux.

    Il reste donc 14 hommes et enfants de plus de 12 ans et 103 femmes et fillettes.

    Le maire compte que chaque réfugié emportera 40 kilos de bagages soit un peu plus de 21 tonnes, auxquelles s’ajouteront les 472 kilos d’archives municipales.

    Le maire termine sa missive par cette question – prière ? – : « Dans l’espoir qu’il vous sera possible de me renseigner sur les moyens qu’éventuellement vous mettriez à ma disposition, et que ces moyens seront suffisamment annoncés à temps pour prévenir les habitants de La Fosse-à-l’eau, La Forge Maillard, les fermes de Maizoncelle, La Vaux Gravier et Courcelles qui sont comprises dans l’énoncé ci-dessus, ma reconnaissance vous serait acquise. »

     En février 1940, le maire écrit de nouveau au préfet car il ne croit pas possible l’application de la lettre-circulaire du 30 janvier 1940. En particulier à cause « de l’indiscipline de la population à se plier en premier lieu à la réquisition des autos que chacun considère comme sa propriété dont il a la libre disposition pour lui et ses proches.

    J’ai déjà eu des échos de cet état d’esprit, et même avec réquisition, s’il n’y a pas d’autorité, soit militaire soit de gendarmerie pour en rendre l’esprit efficace, c’est en présence de nombreuses défections que l’on se trouverait au moment voulu, les intéressés pouvant fuir la nuit. Les moyens locaux sur lesquels on peut compter sont donc excessivement précaires, autant dire inexistants.

    Il y a donc lieu de reconsidérer la question afin que le Maire, le moment venu, ne se trouve pas être resté sur place avec les vieillards et les enfants pauvres. »

    Il préconise de laisser partir les propriétaires d’autos s’ils le souhaitent et propose deux solutions :

« 1° Chauffer un train pour les laissés pour compte puisque la voie existe toujours [Il s’agit de la ligne Mézières-Wasigny, présentée dans le Journal de confinement 12 du 19 mai 2020].

2° Enlever les évacués et leurs bagages par camions militaires, ce qui ne doit pas être difficile à faire au siècle de l’automobile. »

    Il précise que « la discipline du convoi [ferroviaire ou routier, il ne le précise pas] doit être assurée par un peloton de quelques soldats, ou par la gendarmerie, car le paysan qui est peu discipliné le serait encore beaucoup moins, surtout lorsqu’il est énervé comme au moment où il abandonne tout ».

    Enfin il termine par des considérations sur sa situation personnelle : « Je pense qu’il m’aura suffi de vous avoir signalé les points faibles du système proposé pour qu’il y soit apporté remède, ne me sentant pas, moi Maire du pays, apte à assurer ce repliement dans des conditions si précaires d’autant plus que l’état déficient de ma santé, occasionné par de fréquents accès de diabète, m’oblige à des ménagements qu’un repliement éventuel effectué dans ces conditions ne ferait qu’aggraver. »

Une réponse édifiante !

 

    Après l’exode, le maire de Laifour

    Un maire démuni et des frais non remboursables, trois documents qui parlent d’eux-mêmes !

    

Vues agrandies : clic ici

    Des locaux administratifs provisoires

    Gérard Giuliano1 a raconté l’odyssée du préfet des Ardennes et son installation en Vendée : « Dans la soirée du dimanche 12 mai 1940, le préfet des Ardennes, Pierre Pascal, apprenait que les avant-gardes allemandes qui, deux jours plus tôt, avaient franchi la frontière germano-luxembourgeoise, étaient désormais toutes proches à Pussemange, à moins de 20 km de Mézières ! Déjà, sur ordre des autorités militaires, le département s’était vidé d’une bonne partie de sa population. Le préfet Pascal décida alors de partir à son tour et, à 3 h du matin, après s’être assuré que l’évacuation de l’agglomération carolomacérienne était terminée, il se replia sur Rethel. La petite sous-préfecture des bords de l’Aisne était ainsi promue au rang de préfecture. Pour peu de temps. Asfeld prit le relais durant quelques heures le 15 mai, puis ce fut Soissons, pendant trois jours, et le mercredi 22 mai, dans l’après-midi, le préfet arrivait à La Roche-sur-Yon. Son collègue vendéen lui ayant aussitôt fait savoir que ses locaux étaient trop petits pour accueillir deux services préfectoraux, Pascal se replia à Ste-Hermine, un modeste chef-lieu de canton situé à une trentaine de kilomètres de la Roche-sur-Yon, sur la route de Fontenay-le-Comte. C’est ainsi que Ste-Hermine devint, durant quelques semaines, la préfecture des Ardennes. Là, les services préfectoraux se répartirent “dans une vieille auberge que d’aimables rencontres avaient rendu célèbres à la ronde. Les chambres à coucher servirent de bureaux et la salle à manger de cabinet pour le préfet. La tenancière reprit son métier en créant un restaurant à l’usage du personnel”. »

 

La mairie de Braux était aussi installée dans un hôtel !

Jacques Lambert


1 Gérard Giuliano, « Quand la préfecture des Ardennes s’appelait Sainte-Hermine… », Terres ardennaises n°18, marsd 1987, p. 41-50.

     Faits-divers, Le Petit Ardennais du samedi 26 mai 1900, consultable sur le site des Archives départementales des Ardennes

 

 

Accident du travail

De  très jeunes ouvriers querelleurs

Ouvrier belge

AD 08 - Cote PERH44 / 41 - Le PDF du journal du jour : clic ici

    Le dessin d'Alain Sartelet

 

    En ce petit matin de décembre 1550, nous survolons le château de Sedan, l’immense palais-forteresse sort d’une longue et froide nuit. La grande et majestueuse fleur de lys, au plus haut de la Grosse Tour, pointe son or vers un ciel blanc et muet. Dans cette cité close encore, tout s’anime peu à peu, des cuisines à la grande chambre de Monseigneur, les domestiques s’affairent, on ranime les feux dans les appartements. Comme un grand vaisseau de guerre engourdi, comme pris par les glaces, revêtu de son armure de froidure, comme une puissante caraque figée au milieu de l’océan de l’hiver ardennais, le château s’éveille… Dans la grande cour, la neige croque sous les roues des carrosses. Madame la duchesse de Bouillon a revêtu sa robe de drap d’or, les enfants sont habillés, coiffés, beaux comme des cœurs. Le prince a mis son habit de soie noire à boutons de diamant, les pierres scintillent en mille échos d’un petit jour incertain... Soudain, brisant le silence, l’angélus sonne au clocheton poudré de neige … il est temps, la journée commence… tous se dirigent vers la haute chapelle…

Texte et dessin Alain Sartelet, Ardennais confiné à Paris.

_______________

Nous avons publié d'Alain Sartelet :

La principauté de Sedan. 21 x 30 à l'italienne. 180 p., 1991.

Givet et sa région à travers les siècles. 25 x 30. 180 p. en quadrichromie, 2015.

- en coédition avec le Musée de l'Ardenne :

Mézières. Les fortifications et la citadelle. 20 x 25,5. 92 p., 2005.

     La page des jeux - 1 - Les outils - Pascal Chagot

Devinez le nom de l'outil et son usage.

Solution dans le journal n° 14

 

     La page des jeux - 2 - Rimbaud et les voyelles - Philippe Duplayé

Solution dans le journal n° 14

   

Trouvez les 10 erreurs effectuées en recopiant cette caricature du poète Arthur Rimbaud, caricature réalisée par Manuel Luque dans le numéro 318 de la série “Les Hommes d’Aujourd’hui” parue chez le célèbre éditeur Léon Vanier.

Téléchargez

les deux dessins  >>>> 

 

et comparez-les.

 

Vous pouvez colorier cette caricature du Sonnet des Voyelles en respectant les couleurs originales.
A : noir   E : Blanc   I : rouge   U : vert   O : bleu

Le fond bleu pâle - L’habit : bleu - Le sol : rose
Les chaussettes : rouge - Les souliers : blanc
Les ombres du fond et des lettres : gris
Les cinq pots : couleurs indiquées.

       La page des jeux - Solution du jeu du  journal n° 12 -  Les outils - Pascal Chagot

 

Les trois outils sont utilisés par un maréchal-ferrant.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Mar%C3%A9chal-ferrant

1. boutoir : Un boutoir est un outil métallique avec lequel le maréchal-ferrant taille la corne superflue des sabots pour les mettre en forme avant de les ferrer.

https://www.objetsdhier.com/boutoir-1275

2. brochoir : Le brochoir est un petit marteau indispensable pour enfoncer les clous sans les couder. C'est également un outil de frappe équipé d'un côté arrache-clou très utile pour extraire un clou.

3. ferretier : Marteau du maréchal, dont il se sert pour forger les fers.

   Solution du jeu du  journal n° 12 - Histoire d'eaux - Jean-Marie Jolly 

 

Téléchargez la carte et la grille

avec les solutions >>>> 

 

Remarques : Le Ton est aussi orthographié Thon.

Aubenton (Aisne) est proche de la confluence de l'Aube et du Ton d'où son nom !

L'Artoise est notée aussi Wartoise (nom utilisée du côté belge). C'est un sous-affluent de l’Oise.

Les rivières ardennaises : 

 

       Les photos du (dé)confinement :  Jean-Marie Jolly

 

1. Parisette (Paris quadrifolia) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Parisette_%C3%A0_quatre_feuilles

2. Papillon citron (Gonepteryx rhamni) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Citron_(papillon)

3. Cardinal (Pyrochroa coccinea) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pyrochroa_coccinea

4. Alliaire officinale (Alliaria petiolata) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Alliaire_officinale

Vues agrandies : clic ici

   L'index des journaux de confinement - Elisabeth Lambert

Tous les thèmes abordés

dans les journaux précédents

(numéros 1 à 12)

Clic sur l'image >>>>>    

   La lettre n° 79 de Terres Ardennaises d'avril 2020

 

si vous souhaitez la recevoir directement,

envoyez votre adresse mail à

terres.ardennaises@free.fr