La revue N° 135

 

 

 

N° 135 - Juin 2016

Éditorial

 

En juin 1986,1996 et 2006, dates rondes d'anniversaire, nous avons toujours évoqué dans notre revue la période de mai et juin 1936. lien sera encore de même cette fois-ci avec les témoignages, que j'ai recueillis en 2009, de quatre enfants de la Vallée, tous issus de familles ouvrières, ayant vécu ces événements et leur suite logique pour une grande partie de la population ardennaise : l'inauguration à Nouzonville du buste de Jean-Baptiste Clément, le 27 juin 1937.

Si, malheureusement depuis 2009, Henriette Cocu et Raymonde Roger sont décédées. Jean Clerc et Simon Cocu, membres de Terres Ardennaises dès notre naissance, sont encore de ce monde et ont pu, sur certains points, me fournir des informations complémentaires.

De très nombreuses analyses nationales de ce mouvement s'appliquent à merveille aux événements locaux - à Neufmanil et Nouzonville - que j'ai pu relater. Je n'en citerai que deux exemples empruntés au livre de Michèle Ressi : Histoire de France en 1000 citations, Eyrolles, 2011. La première est de Georges Duby : Il y a une exaltation de 1936 faite de foi en l'homme, de croyance au progrès, de retour à la nature, de fraternité qu'on retrouve aussi bien dans les films de Renoir que dans ce roman de Malraux, L'Espoir. » La seconde est de la philosophe Simone Weil (1909-1943) : « Joie de vivre parmi ces machines muettes, au rythme de la vie humaine. Bien sûr, cette vie si dure recommencera dans quelques jours. Mais on n'y pense pas, on est comme des soldats en permission pendant la guerre. Joie de pénétrer dans l'usine avec l'autorisation souriante d'un ouvrier. Joie de trouver tant de sourires, tant de paroles et d'accueil fraternel. Joie de parcourir ces ateliers où on était rivé sur sa machine.

Quatre députés ardennais élus au début du Front populaire, sur six, le soutiennent : Pierre Lareppe (PCF), Maurice Voirin (SFIO), Gabriel Delattre (Radical Socialiste) et Pierre Viénot (Union socialiste et républicaine). Juliette Régnier - journaliste à L'Ardennais après la Seconde Guerre mondiale -, qui travaillait au secrétariat de Pierre Viénot écrivit : Dans l'entourage de Pierre Viénot, nous vécûmes à ce moment-là la période la plus exaltante de notre vie, il ne s'agissait rien moins que de créer du bonheur pour les déshérités et nous étions persuadés de toucher au but...

Gérard Giuliano qui rapporte ce propos dans son article sur Pierre Viénot, paru dans le n° 46 de notre revue en 1994, nous apprend que le 4 juin 1936, Pierre Viénot devint sous-secrétaire d'État aux Affaires Étrangères, poste dans lequel il fut, selon le mémoire de fin d'Études de l'École normale de Charleville qu'écrivit Jean Hénon en 1956, un des premiers, parmi les responsables politiques, à être conscient de la nécessité d'une évolution de ce que l'on appelait alors "L'Empire français", vers une libre association de peuples autonomes. Dix ans plus tard, deux ans après le décès de son mari, Andrée Viénot devint membre du gouvernement en tant que sous-secrétaire d'État à la Jeunesse et aux Sports du 24 juin 1946 au 22 janvier 1947. Le samedi 8 octobre 2016, quarante ans après le décès d'Andrée Viénot, les Archives départementales, la municipalité de Rocroi, la section ardennaise de la Ligue des Droits de l'Homme et du Citoyen et Terres Ardennaises tiendront une journée, ouverte à tous, de réflexion et d'échanges sur l'œuvre et la pensée de ce couple qui a marqué notre histoire départementale mais aussi l'histoire nationale et internationale. Bien évidemment, elle aura lieu à Rocroi, dont le collège va reprendre le nom d'Andrée Viénot, une nouvelle qui a profondément réjoui les membres de Terres Ardennaises, et sur laquelle nous nous contenterons de dire que nous n'avons jamais pensé qu'il pouvait en être autrement !

Jacques Lambert